« Le coup de foudre, c’est moléculaire »

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« Je t’aime », trois mots et mille et une significations. L’amour est un sentiment complexe et unique qui évolue au fil du temps. D’un point de vue chimique, c’est aussi le résultat d’une combinaison bien particulière de neurotransmetteurs et d’émotions. Loin d’être simple à comprendre, ce sentiment en fait voir de toutes les couleurs, mais il est difficile de s’en passer, surtout à l’approche de la Saint-Valentin.

Chaque personne a sa définition de l’amour. Pour Martin Bertrand, amoureux d’une Nathalie depuis près de quatre ans, l’amour a pris des allures différentes à travers son parcours. Il a été en relation durant 19 ans avant de se séparer à l’âge de 40 ans de la mère de ses enfants.

« L’amour c’est quand tu recherches la présence de l’autre personne. Quand, à tout moment, tu souhaites partager un repas, une aventure, une conversation avec celle-ci. L’amour est composé d’une complicité qu’on pourrait retrouver dans l’amitié, mais il comprend en plus un désir d’intimité et de confiance qui se traduit par la sexualité », énonce-t-il.

Mais cette personne, comment fait-on pour la trouver?

Encore à ce jour, les scientifiques ne connaissent pas la raison qui pousse un être humain à ressentir de l’attirance envers un autre. « Si j’avais la réponse à cette question, je deviendrais millionnaire. Par contre, ce que je sais, c’est ce qui se passe dans notre cerveau et dans notre corps lorsqu’on voit la bonne personne. Ça se nomme le coup de foudre », affirme le chimiste et professeur en chimie à l’Université Laval, Normand Voyer.

Selon lui, quatre molécules spécialisées, aussi appelées des neurotransmetteurs, vont être produites lorsque survient le coup de foudre : la phénéthylamine, la dopamine, la norépinéphrine et l’adrénaline. Ce sont également elles qui vont prendre le contrôle total de notre corps. « C’est pour ça qu’on dit que le coup de foudre nous fait perdre les pédales », explique-t-il.

Les molécules du coup de foudre

Lorsqu’une personne tombe en amour, la molécule de la phénéthylamine entre en jeu. C’est notamment la responsable du sentiment de confort et de bien-être. La fameuse molécule du « petit nuage ».

Ensuite, la dopamine vient stimuler la transmission nerveuse, en plus d’améliorer l’humeur et l’enthousiasme de la personne amoureuse. C’est d’ailleurs ce neurotransmetteur qui déclenche le rire nerveux.

Finalement, la norépinéphrine, une molécule qui conduit à une sensation d’euphorie et qui entraîne l’être amoureux à faire les pires bêtises, stimule la production d’adrénaline. À son tour, ce neurotransmetteur accélère le rythme cardiaque et augmente la pression artérielle, ce qui procure une sensation de chaleur dans tout le corps.

« Le coup de foudre, c’est moléculaire. On en a à répétition dans notre vie, peu importe l’âge et les circonstances. On ne peut pas l’empêcher, mais les humains ont développé des trucs pour arriver à le contrôler », ajoute M. Voyer.

Cependant, il existe deux problèmes au coup de foudre : la réciprocité et la durabilité. « Après 18 mois de relation, la concentration des molécules du coup de foudre commence à diminuer et au bout de quatre ans, il n’y en a plus, mais ça ne veut pas dire qu’une personne ne peut pas rester en couple plus de quatre ans. Il y a une autre substance chimique qui va prendre la relève, c’est l’ocytocine », précise le chimiste. L’ocytocine est l’hormone de l’attachement. Elle crée un lien fort et durable entre deux personnes.

Mais, est-il possible d’aimer sans ressentir de coup de foudre? Selon Normand Voyer, c’est réalisable. Dans certains cas, il se peut qu’une personne ne vive jamais de coup de foudre ou à l’inverse, qu’elle ne soit jamais capable de s’attacher à l’autre. Tout s’explique par un déficit de neurotransmetteurs. Dans les faits, c’est pourquoi on dit que le meilleur remède à une peine d’amour est le coup de foudre.

L’amour, une question de sentiments

Le sentiment profond et intense qu’est l’amour ne se limite toutefois pas aux molécules. La professeure en psychologie du Cégep de Jonquière, Mercédès Aubin, l’explique par la théorie du triangle de l’amour du psychologue Robert Sternberg dans lequel l’amour se divise en trois composantes.

La première est la passion. C’est celle qui est liée au désir sexuel et aux émotions fortes. La seconde est l’intimité. Il s’agit de l’ouverture émotionnelle et de la capacité à échanger ses propres émotions et à accueillir celles d’autrui. La dernière est l’engagement. Cette composante peut être vue de plusieurs façons, tant par des projets communs que par de grandes décisions.

Selon Sternberg, il faut y avoir au moins une de ces pièces pour former le casse-tête qu’est l’amour entre deux personnes. Dans de très rares cas, lorsque les trois composantes sont réunies, c’est « l’amour accompli ».

Mercédès Aubin soutient qu’en général, l’être humain est porté à aller vers une personne qui lui ressemble et qui a plus de centre d’intérêt commun. Il est donc vrai de dire : ceux qui se ressemblent s’assemblent. (Photo : Alice Proulx)

Mercédès Aubin soutient que les composantes du triangle de l’amour peuvent, par le fait même, évoluer, se construire et se déconstruire. « Souvent dans les relations amoureuses chez les jeunes, il y a beaucoup de passion et d’intimité. L’engagement prend plus de temps à arriver. Ça peut prendre quelques mois, voire quelques années. »

La professeure en psychologie distingue aussi l’émotion du sentiment. Elle mentionne qu’une émotion est liée à un contexte précis et à des sensations physiologiques tandis qu’un sentiment perdure et est lié à des pensées. « Même si ton cœur n’est pas en train de battre la chamade, tu le sais au fond de toi que tu aimes cette personne. C’est ça la différence », souligne Mme Aubin.

Selon la professeure en psychologie, l’amour ne s’éteint pas, mais se transforme. « Le sentiment d’amour peut être présent, mais si on n’entretient pas la relation, ça peut rapidement dégringoler », affirme-t-elle. Pour qu’une relation amoureuse aille de bon train, elle suggère notamment de communiquer ses besoins et de s’ouvrir à l’autre.

« Je pense qu’on est fait pour aimer. Quand même bien qu’on ne le voudrait pas, ça arrive ! », termine Mercédès Aubin.

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