Prêtrise | Un métier de rencontres, encore aujourd’hui

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«La prêtrise n’est pas un métier, c’est une vocation», affirme l’abbé Magella Guérin. Bien que la place occupée par les prêtres dans la société soit moindre qu’il y a une décennie, leur tâche ne se limite pas à officier la messe. La plupart du temps, les religieux œuvrent dans l’ombre.

L’abbé Guérin est conscient de la perte de vitesse de la religion depuis la Révolution tranquille. Les statistiques sont éloquentes: le taux de fidèles qui assistent à la messe dominicale a chuté de 68 % entre 1957 et 2001, pour se situer à 20 % selon l’étude menée par le Centre d’études ethniques des universités montréalaises en 2014.

L’homme d’Église ne nie pas ces statistiques, mais il soutient que les prêtres ont encore de l’influence dans leur communauté, et ce, même si la gestion de l’éducation et la santé est désormais confiée à des laïcs. «On travaille beaucoup sur l’invisible, notre travail n’est pas tangible. On aide les gens dans leur cheminement, ce qui n’est pas quantifiable», affirme-t-il en pesant ses mots, visiblement soucieux de bien dépeindre son mandat.

L’abbé de la paroisse Saint-Dominique, Louis-Marie Beaumont, abonde dans le sens de son confrère. «Ma tâche est vraiment d’accompagner les gens et les familles qui traversent des passages plus difficiles, souligne-t-il en se berçant doucement. Officier la messe n’est qu’une infime partie de mon travail.» Le prêtre semble serein dans son bureau baigné de lumière. Il a le sourire aux lèvres et l’œil vif quand il parle de ses rencontres avec les fidèles.

Les échanges humains sont selon lui le plus bel aspect de la vocation. Il insiste sur le caractère unique de chaque tête-à-tête. «Il y a une certaine magie à ne pas savoir quelle rencontre on va faire. C’est une aventure à chaque jour», affirme pour sa part l’abbé Guérin.

Si le quotidien des hommes d’Église peut sembler monotone, les deux religieux soutiennent qu’il n’en est rien. «Quand j’arrive le soir chez moi, je suis content de me reposer, rigole l’abbé Beaumont sur le ton de la confidence. La vie est belle, elle est remplie!» Gestion de comités, réunions avec l’équipe pastorale, tâches administratives et rencontres avec les croyants gardent le septuagénaire occupé. «Le quotidien est assez varié», ajoute Magella Guérin.

Bien que la prière représente la majeure partie de la vie d’un prêtre, le religieux est aujourd’hui un homme comme les autres. Là-dessus, Louis-Marie Beaumont souhaite remettre les pendules à l’heure. Révolue l’époque où le dirigeant de la paroisse habitait au presbytère et était entretenu par une gouvernante qui se chargeait des tâches ménagères. «Je paie mon loyer, je fais à manger et le ménage comme n’importe qui», relève-t-il.

Comme n’importe qui, les hommes de foi ont aussi des passions qui n’ont rien à voir avec leurs fonctions. «Si je n’avais pas été prêtre, j’aurais été horticulteur», déclare l’abbé Beaumont en faisant référence à son amour de la nature et de la terre. Quant à lui, l’abbé Guérin cultive son amour de l’eau en se rendant en Gaspésie chaque été depuis une trentaine d’années. L’idée selon laquelle les prêtres se bornent à lire des textes religieux dans leurs temps libres ne serait donc qu’un cliché.

Incompréhension

Magella Guérin, à la tête de la paroisse Sainte-Anne, admet qu’il peut être difficile pour les athées de comprendre le mode de vie choisi par les religieux. «C’est très mystérieux vu du dehors. C’est comme un gars et une fille qui n’ont jamais connu l’amour, image-t-il. Les gens qui n’ont jamais connu l’amour ne peuvent pas comprendre que les épreuves soient moins difficiles lorsqu’elles sont surmontées à deux.»

L’incompréhension, les prêtres y font de plus en plus face à cause des jeunes qui ont grandi dans une société laïque, contrairement aux générations précédentes. L’abbé Beaumont reconnaît que «c’est un peu la faiblesse de l’Église, de ne pas être assez ancrée dans la réalité d’aujourd’hui qui rejoint davantage les jeunes». Un petit ordinateur portatif posé sur le coin du bureau du religieux semble effectivement anachronique dans cette pièce au style vieillot et conservateur.

Bien que les tâches du prêtre aient beaucoup évolué au cours des dernières décennies, le cœur de la vocation est resté le même. Le contact avec les fidèles est primordial et toujours aussi d’actualité qu’il y a 50 ans. «En n’ayant ni femme ni enfants, ma principale préoccupation est la communauté», conclut l’abbé Guérin en résumant en une seule phrase l’essentiel de son quotidien.

 

 

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