Salaire minimum I Un casse-tête pour les employeurs
À moins de trois mois d’une hausse historique du salaire minimum à 12 $, les commerçants devront inévitablement se questionner sur la gestion de cette augmentation, qui défavorisera certains d’entre eux au profit de leurs employés, selon le professeur en économie de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), Thierno Diallo.
La hausse de 6,7 % du salaire minimum actuel, qui est établi à 11,25 $, sera en vigueur dès le 1er mai 2018. Les répercussions de cette montée se feront sentir particulièrement dans les petites entreprises, surtout du secteur tertiaire, d’après M. Diallo.
Selon lui, il y a deux scénarios possibles. «La hausse provoquera un effet impulsif chez les consommateurs qui seront portés à dépenser plus, ce qui augmentera les ventes des commerçants, ou à l’inverse, l’augmentation du coût de la main-d’œuvre forcera les entrepreneurs à fermer leurs portes», mentionne-t-il.
Thierno Diallo ajoute que même si l’augmentation favorisera les moins nantis, l’effet ne sera qu’à court terme, « parce que dans 10 ans au maximum, l’inflation va réajuster le coût de la vie et le salaire minimum sera encore inférieur».
Le crédit d’impôt, les subventions ou le congé de taxe seront donc « vitaux » pour les petites entreprises, soutient le professeur.
Dans un contexte de libre-échange où la compétition est déjà énorme, M. Diallo croit que les entrepreneurs vont devoir innover davantage pour offrir une valeur ajoutée à leurs produits afin d’inciter la population à acheter local.
La propriétaire de la boulangerie Vite des Péchés, une microentreprise établie depuis 2014 sur la rue Saint-Dominique à Jonquière, Stephanie Hariot, a dû se passer des services de l’une de ses deux seules employées et réorganiser son travail en vue du 1er mai.
«Je me payais déjà 7,50$ pour être en mesure de la payer à 11,25$. Maintenant, avec l’augmentation de 75 cents, c’est impossible pour moi de me verser un salaire de 6,75$. Comment je vais vivre?», soulève-t-elle.
Le seul moyen est de gonfler les prix, en espérant attirer plus de clientèle, conclut la commerçante.
Le responsable des ressources humaines des magasins Homies, Alexandre Gagnon, avoue pour sa part qu’il ne s’est pas vraiment penché sur la question pour le moment. «À part mettre moins de monde sur le plancher, je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus», commente-t-il.
Selon lui, la solution serait de couper dans le marketing, car il est impossible d’augmenter les prix du 80 % d’articles provenant de grandes marques.