
Les champignons magiques suscitent un intérêt croissant sur le Web, notamment grâce à la psilocybine, un hallucinogène à l’intérieur des champignons, qui pourrait potentiellement servir d’usages thérapeutiques. Certains consommateurs optent pour la microdose de la drogue afin de contrôler l’anxiété mais leur utilisation suscite des craintes.
Mia*** défie l’anxiété de façon quotidienne et l’idée de consommer des antidépresseurs conçus en laboratoire l’effraie. Elle a donc choisi d’opter pour le microdosage pour régulariser son stress. « J’ai découvert ça depuis plus d’un an en effectuant des recherches sur Internet. Avec une petite quantité, tu n’as pas vraiment d’effet psychotique, ça fait juste te détendre », explique-t-elle.
La jeune femme estime également qu’il faut bien s’informer avant d’entamer le processus. « Il faut connaitre les quantités optimales et connaitre sa tolérance à la psilocybine, pour éviter d’avoir des hallucinations parce que ce n’est pas le but quand on fait de la microdose », témoigne la consommatrice.
Les champignons magiques ont également piqué la curiosité de Samuel***. « J’ai testé trois semaines de microdosage il y a quelques mois. Ça m’a donné un regain d’énergie. Je dirais que ça ressemble beaucoup à l’émerveillement qu’on peut ressentir quand on est enfant », explique-t-il.
Le jeune homme décrit le « voyage » comme une expérience immersive, voire spirituelle. « Sur le moment ça te fait réfléchir à plein de choses en prenant du recul. Personnellement ça a changé mes perspectives sur plusieurs choses, par exemple : je vois mon célibat avec un œil plus doux maintenant », témoigne celui-ci.
Deux poids, deux mesures
De son côté, Charles Roy Dubuc a fait de longues recherches sur Internet avant de se lancer dans son premier voyage avec les champignons magiques. Il s’est laissé tenter par une petite quantité dans une tisane. « Ça m’a enlevé beaucoup d’anxiété. Je suis quelqu’un qui vit à 100 milles à l’heure et ce que j’ai obtenu c’est une sensation de laisser aller. J’étais plus dans le moment présent et je ne ressentais plus la notion du temps », explique le jeune homme.
Toutefois, Charles croit que l’automédication à l’aide de champignons magiques comporte certains risques. « Personnellement, je n’encourage pas quelqu’un à le faire. On s’entend que c’est de la drogue. Ce n’est pas un médicament légal et on peut avoir de mauvaises surprises », mentionne-t-il.
L’intervenante sociale en toxicomanie Anaïs Vanessa Poirier partage les mêmes craintes. « Toutes les drogues mal utilisées, c’est inquiétant, et présentement les microdoses ne sont pas contrôlées », constate Mme Poirier. Elle s’inquiète également des consommateurs qui achètent des capsules en poudre sur le Web puisque c’est difficile de déterminer les composantes de celles-ci.
La psilocybine n’est pratiquement jamais responsable d’une surdose, mais elle représente toutefois un risque si elle est consommée en trop grande quantité. « Un ‘badtrip’ d’hallucinogène peut vraiment créer des traumatismes par la suite parce que ça peut être une expérience très bouleversante. C’est ça qui est dangereux si on dépasse une dose », explique l’intervenante. Elle ajoute que l’expérience d’un « mauvais voyage » peut entrainer des conséquences sur la santé mentale.
Microdosage et santé
L’idée du microdosage de champignons magiques consiste à réduire la drogue en poudre afin de produire des capsules contenant entre 50 à 300 milligrammes de substances. Les adeptes peuvent en consommer, de façon régulière ou irrégulière et vaquer à leurs occupations sans trop ressentir d’effets psychotiques.
La psilocybine étant 10 fois moins puissante que le LSD représente peu de risque de surdoses mortelles. Selon la référence québécoise en toxicomanie, Toxquébec, la dose létale est d’environ 3500 fois la dose recommandée.
Bien que certains essais cliniques aient fait leurs preuves dans les dernières années, aucun produit thérapeutique contenant de la psilocybine n’est actuellement approuvé au Canada. L’hallucinogène fait toutefois l’objet d’études en cours afin de déterminer son utilité en santé mentale.
Les essais cliniques et le Programme d’accès spécial de Santé Canada offrent la possibilité aux Canadiens d’accéder, de façon légale et réglementée, à la psilocybine. La production, la vente et la possession de champignons magiques demeurent toutefois illégales au Canada.
***Par souci de confidentialité, les noms de certains intervenants ont été modifiés.