Derrière le filet à poissons des systèmes pyramidaux

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Moins populaires depuis plusieurs années, le système pyramidal et la vente multiniveaux font couler beaucoup d’encre par rapport à leurs nombreuses manières de faire. Attirantes, mais hasardeuses, ces méthodes d’obtenir un salaire sont à prendre avec des pincettes.

Une enquête menée par La Pige a permis de constater que les chefs d’entreprises de vente à multiniveaux sont prêts à tout pour séduire les intéressés. Leur but : attirer le plus de « recrues » vers le pays des licornes et des princesses afin de remplir leurs propres coffres en touchant une partie du salaire des « employés ».

Les options offertes par les différents dirigeants sont toutes alléchantes. Gros salaire, flexibilité et promotion : les opérations séduction pour attirer le plus d’adhérents ont l’effet d’un réel lavage de cerveau.

La créatrice de contenu québécoise Charlotte Thibeault peut en témoigner. Celle qui compte environ 80 000 abonnés sur l’application « Tiktok » a déjà été approchée par des entreprises « trop belles pour être vraies ». La jeune étudiante de l’Université Concordia confie que toutes les invitations reçues étaient séduisantes, mais qu’elles comportaient trop de dangers financiers.

Créatrice de contenu québécoise, Charlotte Thibeault.

Créatrice de contenu québécoise, Charlotte Thibeault. (Photo fournie)

« Quand tu es pauvre, tu vas trouver beaucoup de moyens pour faire de l’argent. […] J’ai eu plusieurs rencontres avec différentes personnes pour rejoindre des groupes. J’ai même été invitée dans des réunions en ligne pour charmer le plus de gens. Quand c’est rendu qu’il y avait trop de belles propositions, j’ai arrêté tout ça ».

-Charlotte Thibeault


En prenant du recul sur sa situation, Charlotte Thibeault se rend bien compte de la naïveté qui l’a envahie. Alors que son père est avocat de profession, elle a pu hériter de ses conseils pour ravoir les pieds sur terre. La jeune native de Repentigny a même eu l’idée de prévenir par soi-même sa « communauté TikTok » sur le sujet, mais par peur de se faire poursuivre, elle s’est résignée.

Plus de sensibilisation

Les systèmes pyramidaux ont connu leur heure de gloire vers 2018. Malgré l’impopularité qui les efface depuis les dernières années, le nombre de recrues tombant dans le piège demeure constant. C’est un sentiment de naïveté qui n’est pas près de disparaître selon le porte-parole de l’Office de la protection du consommateur (OPC), Charles Tanguay, en raison des nombreux guet-apens souvent complexes à repérer.

Porte-parole de l’Office de la protection du consommateur (OPC), Charles Tanguay. (Photo Yanick Boudreault)

« Il faut utiliser notre gros bon sens, mais c’est vrai que ça peut charmer des personnes avec toutes les fortunes promises. Ce sont souvent des vagues parce que ce type d’entreprises partent et disparaissent après », explique-t-il.

Sur le site du Centre Anti-Fraude du Canada, ce dernier offre plusieurs conseils « pour vous protéger ou protéger votre entreprise contre les fraudes »1. Encore une fois, le flou autour des compagnies de marketing réseau cause bien des maux de tête au gouvernement provincial et fédéral.

« Ils [les systèmes pyramidaux] sont gérés à un certain point par les instances gouvernementales. C’est toujours de départager la liberté d’entreprise. Des modèles d’affaires, il en a de toutes sortes. Et pour dire que ça, c’est illégal, ça prend de bonnes raisons et de bons motifs pour le croire. C’est un peu encadré malgré les apparences », rajoute M. Tanguay, tout en mentionnant que la police continue de démanteler certaines activités d’entreprises en question.

L’envers de la médaille

Même si des compagnies de marketing de réseau, qui demeurent légales pour la plupart, sont questionnables, certaines personnes réussissent à bien s’en sortir dans le domaine. À titre d’exemple, Cassandra-Amélia Poirier-Villeneuve, une ancienne diplômée en Art et technologie des médias au Cégep de Jonquière, a su saisir sa chance et se démarquer avec Entrepreneure MLM.

Cassandra-Amélia Poirier-Villeneuve, une ancienne diplômée en Art et technologie des médias au Cégep de Jonquière. (Photo Yanick Boudreault)

« Actuellement, je suis capable de toucher environ 4000 euros par mois, confie la Saguenéenne à notre équipe alors qu’elle travaille dans la cryptomonnaie depuis maintenant cinq ans. Ça dépend des ventes que je fais, mais si je ne veux rien faire pendant une semaine, je suis quand même capable de toucher de l’argent. »

Pour Mme Poirier-Villeneuve, ne pas avoir de patron est l’un des aspects les plus positifs dans son travail. Alors que plusieurs voient lesdites entreprises en jugeant celles-ci comme des « fraudes », la femme d’affaires à temps partiel dénonce ce genre de propos.

« Parfois, les gens pensent que c’est faux, car nous vendons une plateforme et non des objets. Souvent, les gens vont dire que c’est pyramidal. Je m’excuse, mais toutes les entreprises du Québec sont pyramidales. Il y a tout le temps une personne en haut et tu n’as pas l’occasion de la dépasser », figure-t-elle.

D’après les services policiers et les experts sur le sujet, il faut toujours être sur ses gardes. Comme représenté par Charles Tanguay, les apparences peuvent être parfois trompeuses malgré les beaux discours.

Avec Yanick Boudreault et Nickolas Bergeron

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