Quand le climat transforme la chasse et ses pratiques
Depuis le 28 septembre, la chasse à l’orignal avec bois (10 cm ou plus) et au veau est permise avec des armes à feu dans la zone 28. (Photo : Pixabay)
La chaleur représente un nouvel enjeu pour les chasseurs qui doivent s’adapter aux températures plus élevées. Ces conditions font craindre des pertes de viande incitant plusieurs à modifier leurs techniques pour préserver leurs récoltes.
« Quand un gibier se fait abattre, on a un certain temps pour trouver notre bête et l’amener chez un boucher, donc il y a plus de perte de viande qu’avant. Il fait de plus en plus chaud et le temps est compté. Si tu ne trouves pas ta bête dans les temps prévus alors tu peux perdre ta viande », a expliqué une employée du Pronature Blackburn Chasse & Pêche de Chicoutimi, Jade Lavoie.
Les employés du Pronature Blackburn Chasse & Pêche, Nathan Gendreu, Dylan Allard et Jade Lavoie. Photo : Émil Lavoie
Ces contraintes forcent même certains chasseurs à s’armer de patience.
« J’ai beaucoup de chasseurs qui me disent qu’ils n’ont pas osé tirer parce qu’il fait trop chaud », a relaté l’employé au magasin Chasse et pêche Chicoutimi, Émile Salesse.
« Avant on avait des températures autour de zéro degré. Quand on dit un bon matin de chasse, c’est parce qu’il y a eu une gelée durant la nuit », a observé Mme Lavoie qui pratique cette activité en famille.
« Un gros manteau de fourrure »
Observables sur les habitudes des chasseurs, les impacts de la hausse des températures affectent également celles des orignaux.
« Quand tu arrives dans la forêt, tu le sens et tu le vois. La terre est sèche, le petit lac où tu allais n’y est plus et le trou de bouette dans lequel l’orignal aimait aller se coucher dedans pour se rafraîchir n’est plus là non plus », a fait remarquer Jimmy Salesse, un chasseur qui prend plusieurs facteurs en considération avant d’appuyer sur la détente.
Jimmy Salesse, un amateur de chasse et son meilleur vendeur, Émile Salesse estiment que le respect est une qualité essentielle du chasseur. Photo : Émil Lavoie
L’orignal est reconnu pour réduire ses déplacements, pour fréquenter des habitats plus denses et pour adopter un rythme d’activités plus nocturne lorsque la température ambiante est relativement chaude.
Selon le bilan général de la saison 2023 de chasse à l’orignal du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, « le temps exceptionnellement chaud observé à l’automne dernier pourrait avoir réduit les chances d’observer un orignal pour certains chasseurs.»
Malgré tout, le succès de chasse demeure similaire aux années permissives (récolte de mâles, femelles et veaux permise) antérieures. Plus de 22 600 orignaux ont été récoltés dans l’ensemble du Québec en 2023.
Fini la sédentarité
« La chasse a quand même changé depuis des années sans nécessairement avoir un lien avec les impacts climatiques. Maintenant au lieu d’être assis dans une petite cabane, les chasseurs vont aller plus vers le gibier et marcher plus », a relevé Jade Lavoie.
« Je pense que la chasse et les chasseurs ont évolué. Ils ont compris avec le temps comment le gibier fonctionne et que l’orignal n’a pas nécessairement une bonne vue », a-t-elle spécifié.
Selon la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, le plus grand cervidé du monde a une ouïe et odorat très développés alors que sa vue est plutôt faible. Il distingue donc difficilement les objets immobiles, mais remarque les mouvements.
Toutefois, avec des produits tels que l’urine d’orignal, certains chasseurs parviennent à berner le roi des forêts du Québec et à s’en approcher à des distances surprenantes.
« Il faut chercher et comprendre la bête », a maintenu Jimmy Salesse qui considère que depuis la pandémie, la chasse est sur un bon élan. « C’est plus professionnel et c’est plus propre. Je trouve que c’est moins cowboy qu’avant », s’est-il exclamé.