« On m’a laissée là pour morte »

«Pour moi, le courage ce n’est pas de combattre, c’est de se relever peu importe l’étape qu’on a traversée, et on n’a pas le choix de se relever. On n’a pas le choix de vivre après une agression », dit Geneviève Rioux. Photo : Cédric Bérubé
« Il était clair que mon agresseur voulait une relation sexuelle à laquelle je n’avais pas consentie, on s’est donc battu dans mon appartement, jusqu’à ce qu’il m’étrangle et qu’il me laisse là pour morte. »
C’est par cette citation poignante que la doctorante en psychologie et écrivaine, Geneviève Rioux, a décidé de jeter les bases d’une conférence sur la justice, organisée au Cégep de Jonquière le 13 mars. « En 2018, couchée dans mon lit, j’entends du bruit qui provient du couloir. En ouvrant les yeux, mon agresseur fonce sur moi. Rapidement, cette personne s’est mise à me donner des ordres, et comme je ne coopérais pas, c’est devenu très violent », confie la conférencière.
Muni d’une arme blanche, l’agresseur a poignardé Geneviève Rioux. « J’ai reçu 18 coups de couteau sur la partie inférieure de mon corps, je me suis battue pour ma vie. Mais à ce moment-là, je ne savais pas si j’allais survivre. J’étais sur le bord de mourir quand les policiers sont venus à ma rescousse. Je n’avais plus de pouls radial », explique la conférencière avec émotion.
Un cauchemar semblable
Avec un public déjà pendu à ses lèvres, Geneviève Rioux a ému les gens présents en poursuivant son récit de battante. « En 1999, un homme est rentré dans notre maison familiale en pleine nuit. Il a tenté d’avoir un rapport sexuel avec ma mère, qui s’est débattue. Il a ensuite interpellé ma sœur et moi. C’était la première fois dans ma vie que je faisais face à une agression », ajoute Geneviève Rioux.
« C’est donc pour moi un miracle que je sois ici aujourd’hui et que je puisse vous parler », affirme la survivante.
« Pour moi, être une victime, c’est un passage forcé, mais ce n’est pas une finalité. Ce qui est plus important encore qu’être victime, c’est d’être une survivante », insiste Geneviève Rioux. Photo : Cédric Bérubé
« C’est quoi la justice? »
L’épine dorsale de la conférence étant axée sur la justice, Geneviève Rioux a interprété ce thème sous un angle plus personnel. « Pour moi, la justice est d’arriver à un sentiment, à une réparation. Pour moi, ça passe beaucoup par l’écriture, et la rencontre avec d’autres victimes », raconte l’écrivaine.
C’est le constat que des failles persistent dans notre système qui l’ont incitée à prendre la plume. « C’est le jour où j’ai compris qu’il n’y aurait pas d’accusations et que ça n’irait pas plus loin avec le système de justice que je me suis dit que peut-être que ma justice, d’être vue, lue et entendue, ça passerait par l’écriture », raconte celle qui écrit par passion depuis son jeune âge.
« Mon message aujourd’hui est que la justice, ça s’atteint de plein de façons. Ça s’atteint à travers le système, mais ce n’est pas la seule et unique réponse. Et ce n’est pas la réponse la plus apaisante pour soi-même. »
Les victimes collatérales « plongées dans l’ombre »
« L’impuissance chez les proches, la culpabilité de ne pas savoir comment aider, je trouve ça hallucinant ce que les émotions que peuvent faire vivre aux proches », explique la conférencière. En racontant son histoire atroce, elle n’a pas voulu uniquement axer son allocution sur ses troubles personnels, mais également sur ceux de son entourage.
« Ce que mon père a dû sentir quand je me suis fait agresser, alors que ma mère a antérieurement été elle-même agressée, c’est horrible… Je ne peux même pas imaginer comment il s’est senti », ajoute-t-elle. Geneviève Rioux a profité de son passage pour faire la promotion de son roman Même pas morte, qui fait allusion à des histoires d’agression sexuelle.