Daniel Pachon, une histoire de goût et de passion
La rue Perron, à Jonquière,peut avoir l’air ordinaire. Décorée de maisons familiales et d’arbres remplis de couleurs, nul ne peut envisager ce qui se trouve au bout de celle-ci. C’est en prenant le dernier tournant que la surprise frappe. Donnant des impressions de Poudlard, l’Auberge Villa Pachon se révèle.
Le plaisir visuel se pour- suit une fois entré. Luxueux,l’intérieur rappelle celui de châteaux européens. À gauche de l’entrée, un comptoir d’ac-cueil souhaite la bienvenue aux clients. La cloche qui s’y repose, une fois sonnée, mène à la rencontre de la directrice des opérations, Carole Tremblay. Arborant, avec brio, le sourire, elle gère l’endroit. Elle est la cofondatrice de la place, mais aussi la femme du chef.
Daniel Pachon a débuté en cuisine à l’âge de 16 ans. C’est en 1961, en France qu’il a décidé de se lancer dans l’art culinaire. Huit ans plus tard, il rejoint son frère au Québec, qui habite sur la Rive-Nord de Montréal. «À l’époque, il y avait énormément de demandes dans le monde des cuisiniers, alors j’ai préparé mes papiers et je suis parti pour Sainte-Marguerite. Après trois mois là-bas, j’ai été demandé pour être chef au Manoir Alcan, à Jonquière.»
Ce manoir, fermé depuis 1985, a vu M. Pachon vieillir de 15 ans. L’endroit qui sert mainte-nant à accueillir des conférences de la compagnie a perdu ses cuisines, à la suite d’une grève qui a duré près d’un an. «Quand j’ai vu qu’Alcan voulait changer de cap, je suis allé travailler quatre ans à l’Hôtel Chicoutimi et j’animais une émission à la télévision», mentionne-t-il.
Un autre quatre ans s’est ensuite écoulé au Roussillon, aujourd’hui le Delta, pour que le chef français ouvre finalement sa propre cuisine: Le Restau-rant Pachon. Installé sur la rue Lafontaine, à Chicoutimi, il y cuisinait un menu gastronomique. C’est à cet endroit qu’il a pu gagner de l’expérience dans la gérance d’un restaurant.
Tout comme les clients qui descendent la rue Perron pour la première fois, c’est lors d’une marche en amoureux que Daniel Pachon et son épouse ont été éblouis par la beauté frappante de l’auberge. «Je lui ai dit: “ça serait peut-être intéressant de faire une auberge ici. C’est petit et j’aime ça. L’équipe serait restreinte et le service resterait très personnalisé”», se rappelle le cuisinier.
C’est donc en 1999 que l’Auberge Villa Pachon a vu le jour. Misant sur l’expérience du client, il ne s’agit pas d’une place où l’on mange avant une sortie au cinéma ou au théâtre. La sortie, c’est à l’auberge.
Si l’ambiance est de mise, les ingrédients resteront toujours ce qui compte le plus. Pour le chef Pachon, il est primordial de pouvoir cuisiner avec des aliments d’ici. «Lorsque j’achète du gibier ou du foie gras, ça vient de Québec. J’aimerais ça pouvoir encourager la région, mais les produits pour la gastronomie française ne sont toujours pas produits ici.»
Si ses aliments voyagent à travers la province, ses plats aussi. Assez fréquemment, Daniel Pachon reçoit des contenants par la poste accompagnés de petits mots. Il s’agit de commandes, en provenance de partout au Québec, pour le réputé cassoulet du chef. Le plat français demande plusieurs jours de préparation, mais le travail en vaut la peine, puisque M. Pachon est intronisé à la Confrérie du cassoulet du Québec.
L’expérience du client et la qualité des aliments sont deux éléments importants pour Daniel Pachon, mais le plaisir de cuisiner est ce qui lui permet de continuer à travailler, et ce même à 72 ans. «Tu es formé par des chefs et tu les regardes faire. Tu apprends et tu veux les imiter, cependant tu te dis que tu ne ferais pas telle chose de cette manière ou cette recette là comme ça. Petit à petit, on se prend au jeu», confie l’amoureux de la cuisine.
Avec près de six décennies sous la cravate, M. Pachon sent la retraite arriver à grands pas. «Je n’ai pas de relève et ça, c’est difficile. C’est quelque chose que l’on regrette, parce qu’on a bâti ce restaurant de nos propres mains. Pendant 25 ans, on a travaillé pour lui donner une bonne notoriété et puis du jour au lendemain, ça disparaît», conclut-il, non sans tristesse.