Troubles du spectre de l’alcoolisation foetale | L’inaction de Québec dénoncée

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Le Québec est en retard en ce qui concerne les troubles du spectre de l’alcoolisation foetale (TSAF). C’est ce que dénonce la présidente et fondatrice du seul organisme de prévention du TSAF au Québec, SAFERA, Louise Loubier-Morin.

Les statistiques démontrent qu’une Québécoise sur quatre consomme de l’alcool pendant sa grossesse, tandis que c’est moins de 15 % des femmes dans le reste du Canada. Une situation qui fait bondir la présidente de SAFERA qui déplore l’inaction et le mutisme du gouvernement provincial pendant les 20 dernières années. «Nous essayons de nous faire entendre auprès des instances politiques, nous faisons de la prévention comme nous pouvons, mais nous manquons de moyens», a-t-elle manifesté lors d’un entretien téléphonique.

Les troubles du spectre de l’alcoolisation foetale correspondent à un ensemble de troubles physiques et cérébraux à différents degrés qui découlent d’un contact avec l’alcool avant la naissance.

Le combat d’une vie

Au début des années 1990, Louise Loubier-Morin et son mari ont adopté leur fille Stéfanie atteinte du syndrome d’alcoolisation foetale. Pour obtenir des services pour leur enfant, ils ont dû se rendre dans l’Ouest canadien et aux États-Unis, où le syndrome est mieux connu.

Stéfanie est une adulte, mais son développement s’apparente à celui d’une enfant de 12 ans. Elle a besoin d’accompagnement constant. Elle ne ressent pas la faim, ses parents doivent lui rappeler de manger. «Son système immunitaire est très fragile, elle est sensible aux maladies», souligne la mère.

Mme Loubier-Morin a donc décidé de co-fonder SAFERA en 1998 afin d’aider ceux dans la même situation qu’elle. «Les parents biologiques sont souvent démunis et viennent de milieux défavorisés et les familles d’accueil n’ont pas nécessairement les moyens de se battre. Il n’y a donc que nous, les parents adoptifs pour défendre ces enfants, mais nous sommes peu nombreux, dit-elle. La plupart des enfants atteints de TSAF sont placés en familles d’accueil».

Pas de chiffres, pas de services

Selon une récente étude du Journal of the American Medical Association, les cas de TSAF seraient beaucoup plus nombreux que ce que les chercheurs croyaient. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les diagnostics ne sont pas toujours faciles à établir puisque ce ne sont pas tous les gens atteints qui présentent des traits caractéristiques, comme on l’apprenait dans La Presse le 12 février dernier. Seulement, il est impossible de dresser un portrait au Québec.

En matière de TSAF, Santé Canada utilise les données américaines, prenant pour acquis qu’elles sont les mêmes au pays. «Aucune étude n’est menée dans la province. Il n’y a pas de comptabilisation des diagnostics», constate Louise Loubier-Morin. Selon cette dernière, les médecins ne sont pas nécessairement outillés pour poser de tels diagnostics. «Les TSAF sont assez méconnus au Québec. Quand j’ai adopté ma fille, je n’avais aucune idée de quoi il s’agissait, dit-elle. Il y a eu certains progrès depuis, mais les jeunes atteints sont rarement diagnostiqués et, quand ils le sont, ils n’ont accès à aucun service.»

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