La consommation responsable de plus en plus populaire

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Les ventes de la Société des alcools du Québec (SAQ) ont diminué dans la dernière année. (Pixabay)

Les Québécois reconsidèrent leur rapport à l’alcool et se tournent vers une consommation plus responsable. Une tendance particulièrement présente chez les jeunes qui se détournent de la boisson alcoolisée au profit des écrans.

« On a beaucoup parlé de l’alcool dans les deux dernières années, avec des remises en question sur les bienfaits et les risques pour la santé donc tout ça, je pense que ça peut contribuer à une prise de conscience », explique le professeur agrégé en psychoéducation à l’Université de Montréal Jean-Sébastien Fallu.

Cette volonté de consommer de façon plus responsable est aussi constatée par Alexandre Bergeron, le directeur marketing et gérant de Gootzy, une boutique qui propose des produits sans alcool à Saguenay et à Alma. « On voit que dans les dernières années, le monde est plus concentré sur la santé, sur avoir un mode de vie sain. »

Le gérant note une remise en question de la nécessité de boire de l’alcool depuis quelques années comme le suggère le succès grandissant de certains produits chez Gootzy. « En décembre l’année passée, on a dû vendre environ 300 produits sans alcool alors que cette année on en a vendu 1600. »

Les produits sans alcool sont une option intéressante pour ceux qui souhaitent réduire ou remplacer l’alcool pour toutes sortes de raison comme la santé, la grossesse ou la religion selon Alexandre Bergeron. (Emmanuelle Vérité-Lapointe)

Selon Jean-Sébastien Fallu, la réduction de la consommation est une tendance montante pour tout le monde, mais c’est chez les jeunes qu’elle est le plus observable. « Les jeunes aujourd’hui sont plus conscients, ils ne veulent pas faire des conneries, être cons, saouls morts, et agresser ou se faire agresser. » Des données de l’Institut de la statistique du Québec corroborent ces observations. « La proportion d’élèves [du secondaire] ayant consommé de l’alcool dans les 12 mois précédant l’enquête est passée de 60 % en 2010-2011 à 47 % en 2022-2023. »

Plusieurs facteurs expliquent le fait que la jeunesse consomme moins et commence à consommer plus tard, notamment la présence accrue des écrans. « Consommer, ça se fait souvent par des occasions, des offres, mais quand on est plus chez soi dans sa chambre devant un écran, on a moins ces opportunités-là. On sait aussi que les écrans jouent le même genre de rôle dans la dépendance que les drogues », expose Jean-Sébastien Fallu.

Chez Gootzy, les 35-45 ans sont la plus grosse clientèle des produits sans alcool et cherchent pour la plupart à remplacer leur consommation. Ce n’est pas vraiment le cas des 18-25 ans qui n’ont juste jamais commencer à boire, selon Alexandre Bergeron.

Chez les jeunes, « pour les autres substances, on ne voit pas d’augmentation, à part le vapotage qui a gagné un peu de popularité, mais il n’y a pas l’air d’avoir de remplacement par d’autres substances », indique Jean-Sébastien Fallu. (Emmanuelle Vérité-Lapointe)

Pas d’alcool, pas de problèmes?

La diminution de la consommation d’alcool, est-ce souhaitable? C’est une question que Jean-Sébastien Fallu se pose. « J’ai de la difficulté à voir si c’est une bonne chose, mais je ne veux pas non plus tomber dans « il faut absolument qu’on consomme de manière modérée ». Comme pour la sexualité, il y a des gens hypersexuels, des gens asexuels et c’est ben correct, on est super inclusif par rapport à ça et je pense qu’il faut faire la même chose avec l’alcool et les drogues. »

M. Fallu précise qu’il faut réduire les problèmes liés à la consommation, et non la consommation elle-même. « Pour moi, l’enjeu ce sont les problèmes associés. Ce n’est pas parce qu’il y a plus de consommation qu’il y a nécessairement plus de problèmes. Ceux qui consomment le font peut-être mieux et sont peut-être moins à risque. » Il souligne qu’une baisse de la consommation ne traduit pas forcément une diminution de la dépendance.

Si on ne doit pas diaboliser l’alcool, il ne devrait pas être glorifié, ni banalisé selon le professeur. « Je ne pense pas qu’on devrait dire à quelqu’un « allez, allez un petit shooter ». Je pense qu’on devrait laisser le monde gérer leur consommation et se la fermer. Tout comme on ne dit pas à quelqu’un « allez, allez un petit bec », pour moi c’est la même chose. »

C’est une vision partagée par le gérant de Gootzy. « C’est une mentalité qui est à changer. On s’entend que ce n’est pas parce que tu bois du sans alcool que t’es plate. »

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