« Florent Vollant : Innu », quand la musique guérit

La projection du film a eu lieu la veille de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. (Photo : Léa Morin-Letort)
« Florent c’est mon ami, un partenaire d’affaires, un ami de musique, mon père. Puis des fois on est dans des confidences. Puis Florent, cette semaine, pour une des rares fois, avant-hier il m’a dit “Je t’aime” (sic). » C’est ce qu’a confié les larmes aux yeux le fils de Florent Vollant, Mathieu McKenzie, présent à la projection du documentaire « Florent Vollant : Innu » au ciné-club de Chicoutimi lundi 29 septembre. Son fils considère que cette œuvre permet de guérir les blessures familiales et sociétales.
Musicien et copropriétaire du Studio musical Makusham construit par son père à Maliotenam, près de Sept-Îles, Mathieu McKenzie est aussi le proche aidant naturel de Florent Vollant, depuis l’AVC de ce dernier en 2021. Le héros du film ressentait l’urgence de partager son histoire personnelle et sa vision du monde pendant le tournage qui aura duré plus de 3 ans.
Guérir ses blessures
Le sexagénaire a dû quitter de force le Labrador pour s’installer à Maliotenam à cause de ceux qu’ils nomment « les robes noires ». Il s’agit des membres du clergé catholique en mission pour envoyer les enfants dans des pensionnats. Selon le gouvernement du Canada, au moins 150 000 enfants comme Florent Vollant ont vécu dans ces établissements pour « tuer l’indien » en eux, tel que le retrace le protagoniste dès les premiers instants du film. Séparé de ses parents, Florent a pu compter sur la protection de son grand frère Raoul, mais aussi d’un homme religieux, le frère Fortin. Les traumatismes occasionnés par ces épisodes de vie se transmettent de génération en génération. Ce partage intergénérationnel transparaît clairement dans le documentaire.
« Ce film-là, y’a beaucoup d’amour là-dedans, de pardon. Puis ce que je vous dis là, je l’ai jamais dit à nulle part. On est privilégiés ce soir parce que ce soir, je me guéris, parce que je veux être bien dans mon cœur (sic) », sanglote son fils Mathieu McKenzie.

Florent Vollant a vécu au pensionnat de Maliotenam près de Sept-Îles de 5 à 13 ans.
(Photo : carte interactive, Centre National pour la Vérité et la Réconciliation)
Fiers d’être innus
Le public a applaudi avec sincérité, lors de l’échange avec Mathieu McKenzie et la réalisatrice Isabelle Longnus, à la fin du film. « Je fais partie de cette génération qui avait une très grande honte à être autochtone (sic) », constate la conseillère en perspectives autochtones Michèle Martin, originaire de Mashteuiatsh, qui animait la discussion. « Je me suis rendue compte en écoutant le film, et merci énormément Isabelle, que j’ai commencé à vivre cette fierté-là quand Kashtin est arrivé dans ma vie (sic) », poursuit-elle.

L’échange, animé par Michèle Martin (à gauche) avec Mathieu McKenzie (au centre) et Isabelle Longnus (à droite), a suscité une émotion palpable dans la salle.
(Photo : Léa Morin-Letort)
Le célèbre groupe de musique folk Kashtin, composé de Florent Vollant et Claude McKenzie, a connu un succès planétaire, notamment grâce à leurs titres chantés en innu-aimun.
Se réapproprier la culture
Michèle Martin considère que le chanteur de 66 ans a permis une réappropriation de la culture innue. « J’ai l’impression que ton père, c’est beaucoup ce qu’il a fait, en reconstruisant, à travers la musique, un clan d’appartenance (sic) », explique-t-elle à Mathieu McKenzie.
Appartenir à une communauté, c’est avant tout appartenir à un territoire, tel que le souligne la réalisatrice Isabelle Longnus. « Quand j’ai commencé à écrire le film […], le premier personnage avant Florent, j’avais marqué “territoire” parce que c’était inconditionnel (sic) », raconte celle qui considère aussi que « Florent, c’est le territoire ».

Isabelle Longnus, d’origine française, a été choisie par Florent Vollant pour réaliser ce film.
(Photo : Léa Morin-Letort)






