Hypersexualisation de la femme : quand les garçons s’en mêlent

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Selon une étude de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, « les règles vestimentaires imposées par une école peuvent, dans certains cas, avoir pour effet de porter atteinte à [la] liberté. 

Mercredi matin, le ciel est gris au-dessus de l’école secondaire Charles-Gravel. Les étudiants arpentent les couloirs de l’école et se dirigent vers leurs casiers lorsque le son de la cloche retentit. Tout indique une journée normale, à une exception près. Une vingtaine de garçons, de tous les niveaux, revêtent une jupe.

Au Séminaire de Chicoutimi, environ 15 étudiants ont également décidé de troquer le pantalon de leur uniforme pour une jupe. Le jeudi suivant, on peut observer la même scène à l’Odyssée Dominique-Racine. Dans quel but? Dénoncer les doubles standards et l’hypersexualisation des jeunes filles dans les codes vestimentaires des écoles secondaires. Leur objectif est également de mettre un frein à la masculinité toxique.

Le mouvement est né à Montréal il y a quelques semaines. Des garçons avaient décidé de porter la jupe de leur uniforme, normalement destinées aux étudiantes, par solidarité. Ceux-ci n’en pouvaient plus de voir leurs compagnes de classes se faire réprimander pour leur « tenue vestimentaire non conforme au règlement ». Le mouvement a par la suite pris énormément d’ampleur grâce aux réseaux sociaux et a rejoint des écoles de partout au Québec.

Alors que le mouvement a initialement été lancé dans une école privée où l’uniforme est obligatoire, les élèves du public ont tout de même décidé de porter la jupe. Les étudiants considèrent que même dans les écoles publiques, les codes vestimentaires sont trop restrictifs et stricts.

Des jeunes filles rencontrées à l’école secondaire de l’Odyssée Dominique-Racine ont affirmé s’être déjà fait avertir à de nombreuses reprises pour leur tenue vestimentaire, que ce soit pour la longueur de leurs jupes et celle de leurs chandails, ou des bretelles trop « révélatrices » selon les surveillants.

Pourtant, rares sont les garçons ayant participé au mouvement du port de la jupe lors des dernières semaines qui ont reçu des avertissements. Selon certains d’entre eux, leur propre jupe était même parfois plus courte que celles de leurs compagnes de classe, qui ont quant à elles reçu des avertissements.

Des critiques enflamment le Web

Comme le mouvement a gagné sa popularité sur les réseaux sociaux, pas étonnant que celui-ci ait soulevé plusieurs critiques.

Dans le texte Une histoire de jupes du réalisateur Xavier Dolan publié sur La Presse, on peut notamment lire : « Si nous saluons d’une main l’initiative de ces garçons, mais condamnons de l’autre les filles rejetant les codes que cette même initiative décrie, nous assujettissons et antagonisons par ce double standard les femmes de demain, et démontrons encore une fois aux hommes que, le beau rôle, qu’ils portent ou non la jupe, leur appartient ».

En effet, à maintes reprises et ce, depuis quelques années, les jeunes filles ont tenté de faire avancer les choses et de se faire entendre. Le mouvement des carrés jaunes, né en 2018, dénonçait la même problématique.

Défier les normes vestimentaires 

Au Séminaire de Chicoutimi, le code vestimentaire est réglementé de façon non-genré, contrairement à plusieurs écoles privées.  « Un garçon qui voudrait porter la jupe de la collection pourrait le faire et les filles pourraient porter le pantalon. Nous sommes une école très ouverte, » explique la technicienne en loisirs de l’école, Chantale Bourbonnais.

Victor Lévesque n’a quant à lui pas besoin d’un mouvement pour porter la jupe. L’étudiant de secondaire 5 du Séminaire de Chicoutimi profite des « Journées P », où les étudiants peuvent s’habiller en civil, pour s’exprimer par leurs vêtements. « Lors des deux dernières Journées P, je me suis mis en jupe, question de goût personnel », déclare le jeune homme.

Il raconte également que, grâce à cela, les garçons qui ont porté la jupe ont pu s’éviter certains regards lors de leur participation au mouvement: « J’ai un peu brisé la glace, si on veut », lance Victor en rigolant.

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