Des patients sonnent l’alarme d’urgence

Share:

Entre le 28 octobre et le 3 novembre 2024, le taux d’occupation était de 116 % en moyenne dans les urgences de la province. Photo : Félix-Antoine Bétil

AVC mal diagnostiqué, préjugés envers un diabétique, réaction à une vaccination pas prise au sérieux : les exemples ne manquent pas pour décrire les mauvaises expériences rapportées par de nombreux patients dans les urgences québécoises.

Une mère de cinq enfants de Rivière-du-Loup, Janelle St-Hilaire, a grandement perdu confiance envers le système de santé ces dernières années.

Au mois d’octobre 2024, sa belle-sœur a été transportée à l’urgence pour des problèmes de santé. « Elle avait des symptômes d’AVC, mais [les professionnels de la santé], quand ils ont vu au dossier qu’elle avait la sclérose en plaques, ils ont juste pensé que c’était une crise. Ils l’ont donc retournée chez elle », s’attriste Mme St-Hilaire.

De retour à la maison, sa belle-sœur n’était plus capable de marcher. Elle a par la suite été transférée de Rivière-du-Loup à Rimouski, où le neurologue a finalement diagnostiqué un AVC.

Quatre jours plus tard, son décès a été constaté à l’hôpital après être « tombée dans le coma ».

Janelle St-Hilaire a vécu une autre histoire qui lui a fait perdre confiance envers le système de santé.

Son conjoint diabétique souffre d’hypoglycémie (insuffisance du taux de sucre dans le sang). Selon ce qu’elle raconte, il a dû subir des accusations non fondées du personnel.

« Je lui avais donné beaucoup de jus de raisin pour augmenter son taux de sucre, mais ça ne remontait pas. À l’urgence, il a vomi le jus de raisin. Pis eux autres, ils étaient convaincus qu’il avait vomi du vin. »

Le Protecteur du citoyen a reçu 2279 plaintes au Québec en 2023. Photo : Félix-Antoine Bétil

La cause de tous ces problèmes?

Selon le rapport 2023-2024 du Protecteur du citoyen, une dépersonnalisation des soins et services, une rigidité administrative rattachée à certaines décisions des milieux de soins, des fonctionnements en vase clos, ainsi qu’un manque de formation et d’encadrement du personnel sont en cause.

Résultat, l’ombudsman observe un manque de temps et de ressources, une usure de compassion, un roulement de personnel et des intervenants du réseau d’urgence débordés par leur charge de travail.

Les principaux motifs de plaintes au Protecteur du citoyen sont les lacunes dans la qualité des services, l’atteinte aux droits et le comportement inadéquat du personnel. Photo : Félix-Antoine Bétil

Bien que laborieuses, des solutions existent

La responsable des relations avec les médias au Protecteur du citoyen, Carole-Anne Huot, explique qu’une plainte peut d’abord être formulée à l’hôpital. Une deuxième plainte peut être envoyée au Protecteur du citoyen si la première est rejetée et l’ombudsman a 60 jours pour y répondre.

« Dans le cas où la plainte est fondée, on va émettre des recommandations à l’instance visée. Celle-ci a un délai pour nous répondre et on va suivre l’application de ces recommandations jusqu’à la pleine implantation. Tant et aussi longtemps que le changement n’a pas été mis en place, on fait des suivis et on reste dans le dossier », explique-t-elle.

« Je dirais que 99 % de nos recommandations sont acceptées et suivies par les établissements », ajoute-t-elle.

Entre 2023 et 2024, 40 % des 2279 plaintes envoyées à l’ombudsman étaient fondées et 119 instances du réseau de la santé et des services étaient en tort.

De plus, selon le rapport 2024 du registre national des incidents et accidents survenus lors de la prestation de soins de santé et services sociaux (RNIASSSS), 461 905 événements indésirables ont été rapportés dans le réseau de la santé sur 3,6 millions de visites à l’urgence. Parmi ces événements indésirables, 592 ont mené à un décès.

D’après les rapports du Protecteur du citoyen et du RNIASSSS des dernières années, la tendance est à la hausse.

Notons que le Collège des médecins et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec n’étaient pas en mesure d’accorder une entrevue à La Pige.

Share:
Avatar photo