Rencontre avec Yves P. Pelletier : me suivez-vous ?
Yves P. Pelletier n’écarte pas la possibilité d’un troisième ouvrage sur sa vie dans quelques années. Photo: Émil Lavoie.
« Tout le monde a appris la chorégraphie ? », s’est exclamé Yves P. Pelletier en provoquant l’hilarité générale à son entrée dans la salle de la bibliothèque publique de Chicoutimi, lieu servant d’échange avec ses lecteurs jeudi soir. De passage pour promouvoir son autobiographie au Salon du livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean 2024, l’auteur n’a pas manqué de partager ses anecdotes de voyage, parfois empreintes d’humour et d’excentricité.
Devant une quinzaine de personnes, il est revenu sur certains moments forts de son dernier bouquin intitulé, Me Suivez-Vous?, la suite de Déboussolé. Paru en mars, le livre raconte l’histoire du jeune trentenaire, alors membre d’un groupe d’humour populaire, romantique insatiable, dans sa phase du non et souvent dur à suivre.
Auteur, réalisateur, acteur, scénariste et humoriste, Yves P. Pelletier sait égayer son auditoire au moment opportun avec son énergie débordante et son humour spontané. Membre de Rock et Belles Oreilles (RBO) depuis 1981, il se décrit comme un « artiste de variété ».
Dans le contexte de son récit personnel, l’animatrice de la soirée Christine Payette le qualifie de « voyageur non pas touriste, mais humaniste ». Selon elle, les rencontres qu’il a développés à l’étranger sont le fruit d’une curiosité intellectuelle et d’une sensibilité aiguisées qui lui ont permis de percer la barrière de la langue.
« J’ai des amitiés, quasiment comme de la famille, des gens que j’ai aidés à immigrer au Canada », confie celui qui a, entre autres, visité l’Himalaya, le grand Nord et l’Amazonie.
« J’aime apprendre les rudiments des langues. J’avais hâte de savoir ce qui était écrit sur les boites de céréales. » (Émil Lavoie)
Dans son récit, Yves P. Pelletier raconte avoir discuté de spiritualité avec un moine tibétain, il étale ses recherches amoureuses et dévoile des côtés effrayants de la célébrité. Tous des sujets abordés lors de la séance de questions du public avide de précisions dans la petite salle de la bibliothèque.
Trouver le Nord
En décembre 2004, l’auteur chassait le phoque au Nunavut. Il réalise alors un rêve d’enfance tardif, « devenir Esquimau ». Cette expédition était plutôt un prétexte pour tourner un documentaire portant sur le quotidien des Inuits, des voisins, selon lui, trop méconnus.
« Je suis revenu pas la même personne […] Premièrement, il y a quelque chose de troublant. C’est un territoire d’une immensité incroyable et d’une culture riche. Ça sent les ancêtres et les esprits », a-t-il relaté. « On se replonge il y a 20 ans, au moment où les questions autochtones étaient moins d’actualité. Moi, c’est quelque chose qui m’a toujours passionné, mais j’étais toujours seul dans mon coin. »
Souhaitant le plus d’authenticité possible, il a réalisé, à l’aide d’un traducteur, plusieurs entrevues en inuktitut. L’une l’a particulièrement marqué.
« Il y avait un vieux monsieur qui s’est perdu sur une banquise pendant quatre jours lorsqu’il était adolescent ». Interrogé sur ce que les gens qui allaient visionner le documentaire devraient savoir sur son milieu de vie, il a simplement répondu, « dis-leur qu’il fait frette ».
Le froid, un ami et un ennemi qui vous attend à chaque tournant, représente une métaphore. « Tu te rends compte de la précarité de toute vie là-bas quand t’es en plein hiver à -40o et que tu sais que si tous tes copains inuits décident de s’en aller et de te laisser là, tu vas survivre cinq minutes. » L’unité devient donc un passage essentiel dans cet environnement hostile. Par chance, pour les visiteurs, les gens y sont généreux et drôles, assure Yves P. Pelletier dans l’épilogue de son livre.
Aujourd’hui en couple depuis 12 ans, il semble avoir trouvé son « chez nous » et avoir élargi la formule du « je » présente dans son parcours d’adulescent. Il ponctue ses œuvres littéraires d’enjeux sociaux avec une habile touche humoristique propre à lui.
« À force de couche de légèreté, il n’y a pas de profondeur, mais il y a de la densité », a-t-il conclu.