Santé et sexualité des femmes : un sujet encore tabou

Une étude de la Fondation canadienne des femmes de 2022 révèle que 55 % de la population canadienne ne comprend pas pleinement la notion de consentement. (Crédit : Lyra Larouche)
Malgré les cours de sexualité obligatoires à l’école, certains préjugés, mythes et incertitudes sont encore au cœur de la santé et de la sexualité des femmes. Les jeunes restent souvent peu informées sur leur propre corps.
Apparu au début des années 1970, le concept de santé sexuelle est un sujet toujours en évolution. La santé et la sexualité des femmes restent marquées par un certain manque de connaissances sur le sujet.
Selon la sexologue Mia Dyer, l’ancienne manière d’éduquer les jeunes filles sur leur sexualité serait l’une des raisons du manque de maîtrise du sujet. « Il y a eu beaucoup d’éducation par la peur où on disait aux jeunes femmes qu’il ne faut pas avoir de rapport sexuel, qu’il ne faut pas tomber enceinte rapidement, etc. »

La sexologue Mia Dyer est membre de l’Ordre professionnel des sexologues du Québec (OPSQ) qui a comme but d’améliorer la santé sexuelle des Québécois. (Crédit : Courtoisie, Mia Dyer Sexologue)
Il y a également des lacunes quant aux études scientifiques qui sont faites sur les femmes et leur santé sexuelle. « Il n’y a pas beaucoup d’études qui ont été faites réellement à partir de l’expérience des femmes, ce qui fait en sorte qu’il y a beaucoup de mythes et de préjugés encore à déconstruire », explique la sexologue.
Par exemple, le liquide utilisé sur les serviettes hygiéniques vient récemment d’être changé pour mieux ressembler à la viscosité du sang. Avant, l’eau était utilisée, donc plusieurs se plaignaient de serviettes inadéquates à leurs besoins. « Elles n’étaient pas testées ou adaptées à la santé sexuelle des femmes », précise Mya Dyer. Selon le site Planetoscope, 1 447 serviettes hygiéniques sont utilisées chaque seconde à l’échelle mondiale.
Pour l’infirmière de la Polyvalente d’Arvida et de l’École secondaire Riverside, Émilie Fortin, le manque de connaissances a un lien avec la gêne des étudiants. Elle remarque que les jeunes trouvent que « c’est gênant de demander ». Un sondage de Statistique Canada, datant de 2024, relate qu’« environ 1 personne sur 5 de 15 à 24 ans a déclaré qu’un inconfort à parler de sa santé sexuelle ou reproductive l’avait déjà empêchée d’obtenir de l’aide d’un fournisseur de soins de santé ».
Selon Mia Dyer, un autre aspect pouvant nuire à une éducation plus complète est le climat actuel aux États-Unis. Par exemple, les préjugés en lien avec l’avortement font « en sorte que c’est encore plus restreint pour ce qui est de l’éducation par rapport à la santé sexuelle féminine ».
Le plaisir féminin est aussi un sujet qui n’est exploré qu’en surface. « Il n’y a pas beaucoup d’aspects qui sont posés sur le plaisir qui est lié à l’acte [comme] le fait d’affirmer ses propres choix par rapport à son corps », observe la sexologue.
Une étude de 2024 publiée dans la revue Archives of Sexual Behavior indique que 73 % des répondantes féminines affirment avoir déjà atteint l’orgasme par la masturbation ou avec un ou une partenaire contre 85 % des répondants masculins.
Cet écart pourrait être expliqué par le manque d’éducation sur l’anatomie féminine. « La plupart des recherches et des données reliées à la sexualité et les études sont basées sur la biologie masculine », révèle Mme Dyer.
Émilie Fortin explique pour sa part que le nouveau programme de Culture et citoyenneté québécoise permet tout de même de toucher à plusieurs volets de la sexualité. Les infirmières viennent ensuite complémenter l’information, notamment pour les risques de grossesse, la contraception et les tests de dépistage d’infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS).
Pour Mia Dyer, l’ajout de formations faites par des sexologues pourrait enrichir l’éducation faite aux jeunes femmes dans les écoles. Elle pense également que faire de la prévention sans utiliser la peur comme auparavant serait pertinent.






