Marie-Josée Morissette, invaincue malgré deux cancers
À 54 ans, Marie-Josée Morissette a vaincu deux cancers. Photo : courtoisie
Après cinq ans de lutte, Marie-Josée Morissette a célébré en octobre la fin de sa rémission du cancer du sein. Une victoire qui a un prix. À 54 ans, Marie-Josée Morissette, surnommée MariJo par ses proches, a traversé des épreuves qui auraient pu briser bien des personnes. En invalidité permanente après avoir vaincu deux cancers, cette mère monoparentale de deux filles de 24 et 20 ans a toujours su garder son sourire et sa bonne humeur.
Originaire de Chicoutimi, Marie-Josée a quitté le cocon familial à la fin du secondaire afin de poursuivre ses études en design intérieur au Cégep de Trois-Rivières. Mais alors que tout se passe pour le mieux sur le plan scolaire, Marie-Josée ressent une douleur persistante à la jambe. « J’avais du mal à me rendre au Cégep », raconte-t-elle.
Après un an d’infiltrations à la cortisone et un diagnostic erroné de tendinite, elle apprend finalement qu’elle souffre d’une tumeur à cellules géantes et intéressantes au condyle fémoral externe. Un véritable choc pour la jeune étudiante qu’elle était.
« Tu as 21 ans, tu entends “tumeur” et dans ta tête, tu entends “tu meurs”, se souvient-elle. Tu te retrouves à passer des examens, entourée de personnes âgées, sans cheveux, visiblement malades. Puis tu arrives avec ta grande tignasse brune et tu penses que tu vas mourir. »
Elle ne le sait pas mais l’opération qui suit n’est que le début d’un parcours éprouvant. « La tumeur était bénigne, mais elle était destructive, elle mangeait tout mon os. Ils m’ont dit que j’étais passée à deux cheveux de l’amputation. » Malgré cela, elle poursuit ses études et obtient un emploi à Montréal comme chargée de projet en design intérieur chez Hydro-Québec.
Un traitement qui laisse de lourdes séquelles
Les années passent et le souvenir de ce mauvais rêve commence à s’estomper dans l’esprit de Marie-Josée. Toutefois, 13 ans plus tard, en 2005, la tumeur refait surface. « À ce moment-là, je me mets à tomber partout, et je dois trouver un médecin à Montréal », confie-t-elle. Une amie lui recommande un orthopédiste, qui confirme ses craintes : la tumeur est de retour, toujours bénigne, mais encore une fois, l’opération est inévitable. Une prothèse est nécessaire afin de combler le vide laissé par l’enlèvement de la masse.
En 2012, alors que ses filles ont 8 et 12 ans, la tumeur récidive, suivie cette fois du diagnostic tant redouté : un cancer des os. « Je n’ai pas le temps, j’ai un travail à temps plein, donne-le à quelqu’un d’autre », ajoute la mère monoparentale. Après la phase de déni, c’est la colère qui s’installe chez elle.
« Le médecin de Montréal me voyait chaque année depuis 2005. On faisait des radiographies de ma jambe et de mes poumons. Mais moi j’étais dans le déni. C’est quoi le rapport entre ma jambe et mes poumons », se souvient-elle. Et soudain, toutes les pièces s’emboîtent dans l’esprit de Marie-Josée : Terry Fox qui avait ce même cancer des os était décédé des suites de métastases aux poumons. « Ma réaction a été de dire : je ne peux pas pleurer, je suis assommée, et je comprends que si on me suit pour mes poumons c’est que c’est grave. Encore une deuxième fois je me dis, est-ce que je vais mourir ? »
Avoir un cancer des os à 42 ans est très rare, on l’observe plus souvent chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes, selon la Société canadienne du cancer. « Ils m’ont dit on va te donner la chimio la plus extrême », raconte Marie-Josée Morissette. La chimiothérapie s’impose, agressive et invalidante. « On m’a dit que j’allais devenir un zombie ambulant pendant un an. »
Après plusieurs années de lutte, parsemées de séjours à répétition à l’hôpital avec des chimiothérapies mettant à mal son système immunitaire, Marie-Josée fait face aux séquelles post-traitement. « Le après, on ne m’en avait pas tant parlé, c’est bien plus dur que le pendant. Parce que du jour au lendemain tu te retrouves orpheline, les gens pensent que quand tu as terminé tes chimios, tu es guérie. Sauf que les chimios ont certes brûlé le cancer mais elles ont aussi brûlé les autres organes. Tu es l’ombre de toi-même, il y a plein de choses qui ne vont pas mais ça ne se voit pas, c’est invisible. » Ses blessures psychologiques sont nombreuses, les effets des traitements permanents et les douleurs constantes.
En 2015, on lui annonce qu’elle ne pourra plus travailler. « Et là je rentre dans un deuil. Tu as 47 ans, on te met en invalidité permanente, tu perds ta sécurité financière à vie et tu rechutes, tu tombes. Tu te mets à en vouloir à la maladie, à en vouloir au système, tu te mets à t’en vouloir parce que tu n’as pas été assez forte pour prendre des forces et revenir travailler. »
Le cancer du sein, un énième défi
Même si le chapitre semble se clôturer, l’anxiété et l’hypervigilance restent bien présents. « Aussitôt que tu as mal quelque part tu paniques », confie-t-elle. En 2019, son sein droit lui fait mal. Après des examens mammographiques, une échographie et une biopsie, on lui détecte des cellules précancéreuses et Marie-Josée apprend qu’elle va devoir subir une mastectomie partielle.
C’est impensable pour elle, d’autant plus qu’elle entend profiter pleinement de son été : « Dans ma tête à moi tu vas m’enlever la moitié d’un sein alors que je n’ai pas de cancer et je ne comprends rien. » Elle finit par se résigner et trace la ligne de son bikini au Sharpie. Après analyse, les cellules se sont révélées cancéreuses. « J’ai fait des radiothérapies et j’ai été chanceuse que ce soit traité au début », raconte Marie-Josée.
Une résilience inébranlable
Après 10 ans de rémission pour son cancer des os et cinq ans pour le cancer du sein, célébrés en octobre dernier avec sa conférence « Célébrer la vie avec MariJo- Au -delà des plans », Marie-Josée est encore à la recherche de son identité. Elle se plaît à dire qu’elle est une « inspiratrice porteuse d’espoir ». Loin de se laisser abattre, elle a dû se réinventer.
« Mon message, c’est de continuer d’avancer. Quand tu tombes, tu te relèves, tu as le droit de tomber encore. »
Pour ses proches, Marie-Josée incarne cette résilience inébranlable. Sonia Girard, amie depuis le secondaire, la décrit comme « une personne d’exception, ouverte et respectueuse, toujours prête à écouter et à comprendre. » MariJo, c’est également une personne qui ne se laisse jamais envahir par le désespoir. Une qualité qu’admire Sonia Martellino, une amie rencontrée par l’intermédiaire de leurs filles.
Nombreuses sont les Sonia qui gravitent autour de Marie-Josée mais toutes peignent le même portrait d’une femme forte qui a toujours su garder la tête haute. Sonia Leclerc souligne le courage de son amie, qui, même face aux épreuves, garde une attitude inébranlablement positive. Valérie Gauthier, sa nièce par alliance, ajoute : « C’est une femme forte, résiliente, inspirante en qui j’ai une grande confiance et qui veut aider les autres. Elle a su garder le cap même si ce n’était pas toujours facile émotionnellement et mentalement. » Pour Valérie, MariJo est bien plus qu’une simple tante, elle est un modèle et une source d’inspiration.
Depuis son combat contre le cancer des os, Marie-Josée s’investit avec passion comme bénévole à la Société canadienne du cancer. « J’ai pu utiliser mes compétences professionnelles en gestion de projet. La fille proactive que j’étais, a comme ressuscité », dit-elle. Elle est également patiente partenaire à l’hôpital de Chicoutimi et inspire d’autres personnes touchées par la maladie en partageant son expérience.
Pour le futur, Marie-Josée à plein de projets : continuer de faire connaître ses conférences aux différentes entreprises et organismes, lancer son propre podcast ou encore « créer un endroit de bien-être pour socialiser avec les gens qui vivent les mêmes choses que toi. » Diplômée de la vie, elle ne compte pas abandonner la sensibilisation autour de cette cause qui lui tient à cœur.