Rester au Canada : un défi de taille pour les étudiants internationaux

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Le TCF est un test parmi tant d’autres et des papiers parmi une tonne à faire pour les immigrants. Selon M. Frozzini, il va falloir suivre ce qui s’en vient sur les décisions de l’immigration, car c’est un enjeu très important. (Photo : Thalia Chevalier) 

Depuis le 1er novembre, le gouvernement fédéral exige des étudiants internationaux qu’ils réussissent le test de connaissance du français (TCF), afin d’obtenir les permis nécessaires pour travailler sur le territoire canadien après leurs études. Une mesure qui s’ajoute aux demandes déjà exigeantes.

Le TCF Canada est obligatoire pour les immigrants qui viennent au Canada depuis 2019, mais il n’était pas demandé pour l’obtention d’un Permis de travail postdiplôme avant cette année. Aujourd’hui les étudiants internationaux qui souhaitent rester au Canada et y travailler doivent réussir ce test.

En quoi consiste le TCF Canada ?

Le TCF Canada a pour but d’évaluer le niveau de français des immigrants dans quatre épreuves différentes : la compréhension écrite et orale ainsi que l’expression écrite et orale, selon le site du gouvernement canadien.

Afin de réussir le test Formation-TCF Canada, propose des cours pour chaque compétence évaluée entre 15 et 60 jours allant de 80 $ à 170 $. Sources : TCF-canada.com

Il faut atteindre en général le niveau A1 avec un nombre de points supérieur ou égal à 101 pour réussir le TCF. Pour plus d’informations sur l’épreuve du TCF en elle-même, consultez. (TCF – Canada | France Education international).

Problématique du TCF Canada

 L’origine du test est un problème majeur, selon le professeur en arts et lettres à l’UQAC et spécialiste en termes d’immigration et d’étudiants internationaux, Jorges Frozzini. « J’ai beaucoup de problèmes avec ces tests de français parce qu’ils sont tous faits et gérés à l’extérieur du pays (en France) alors qu’on a tout pour le faire ici », explique-t-il, en nommant l’Office de la langue française et les universités.

« Dans le TCF ce sont des références françaises et non d’ici. Ça crée des problèmes pour les gens qui ont appris la langue ici parce qu’on ne leur demande pas les façons de faire d’ici », dénonce-t-il.

Difficulté du test

Le niveau exigé est intermédiaire selon le site du gouvernement canadien. Une finissante française du Cégep de Jonquière, Tesnime Haj, souhaite rester au Québec après ses études et a trouvé ce test « ridicule ». « J’ai dû passer le test la semaine dernière à l’UQAC et je me suis dit sérieux, j’ai payé 400 $ pour prouver que je parle bien français alors que je suis française, c’est n’importe quoi », déplore-t-elle

« Ça a toujours été bizarre qu’on demande à des francophones de passer les tests, mais pour les autres nationalités [personnes dont la langue maternelle est différente] le test n’est pas adapté », affirme M. Frozzini. Il se demande aussi si tout le monde au Québec, même ceux nés ici, pourrait réussir le test.

L’objectif du TCF

 Selon M. Frozzini, un des objectifs principaux du gouvernement derrière l’obligation de passer le TCF est de réduire le nombre d’immigrants. « On est dans un contexte où on est en train de fermer les portes au Canada. Il y a beaucoup de changements pour réduire le nombre des personnes qui vont venir ici. Je pense que ce test en fait partie, comme tous les autres documents obligatoires pour l’immigration. Il y a aussi du côté politique et social une vision beaucoup plus négative envers l’immigration qu’avant », constate-t-il.

En effet, l’année dernière, le gouvernement fédéral avait instauré un nombre limité de 40 000 permis d’études et de travail à donner. Et plus récemment, le 26 février 2025, un décret du gouvernement Legault a annoncé sa décision de réduire le nombre d’étudiants étrangers acceptés au Québec de 20 % par rapport à l’an dernier.

« Faire ou renouveler des papiers ça devient vraiment contraignant, j’ai l’impression qu’on ne veut pas nous laisser rester ici alors que j’ai étudié et construit ma vie au Québec », explique avec peine Tesnime Haj. M. Frozzini est en accord avec la vision de l’étudiante française, car pour lui les politiques envoient un message de rejet envers les immigrants.

De son côté, Immigration, Réfugies et Citoyenneté Canada (IRCC) soutient que cela vise à harmoniser les exigences en matière d’immigration. « En exigeant que les étudiants atteignent les niveaux linguistiques de la résidence permanente plus tôt dans le processus, nous maximisions leur chance de réussir la transition vers la résidence permanente », explique-t-on dans un message courriel.

Il ajoute également qu’alors qu’il s’efforce de ramener le nombre de résidents temporaire au Canada a un niveau viable, il veut s’assurer que « les titulaires de Permis de travail Post-Diplôme (PTPD) sont prêt à réussir sur le marché du travail et qu’ils obtiennent les meilleurs résultats à long terme », en raison de leurs compétences linguistiques.

Une erreur ?

Pour l’expert en immigration, Jorges Frozzini, c’est une erreur monumentale de fermer les portes encore plus aux étudiants qui souhaitent rester au Canada. « C’est un non-sens total, car ils ont été formés ici, ils sont prêts et veulent rester ici, ils ont fait leurs preuves parce qu’ils ont étudié ici. La plupart ont déjà trouvé un emploi et ils connaissent bien les milieux. Ils sont prêts et là, on leur ferme la porte alors qu’ils peuvent nous aider économiquement », explique-t-il.

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Photo ronde Thalia Chevalier.